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LAI DE GUGEMER.

frir plus long-temps. Cher ami, si je peux parvenir à m’échapper, j’irai à l’endroit où vous vous êtes embarqué, pour me précipiter dans la mer. Elle avoit à peine achevé ces paroles qu’elle se lève, et vient à la porte où elle n’aperçoit ni verrou ni serrure. Profitant de l’occasion, elle sort de suite, se rend sans obstacle au port où elle trouve le vaisseau qui avoit conduit son amant ; il étoit amarré à la roche, d’où elle vouloit se précipiter dans les flots. Elle s’embarque sur-le-champ, mais une réflexion vient modérer la joie qu’elle ressent d’avoir obtenu la liberté. Son ami n’auroit-il pas péri ? Cette idée lui fait tant de mal, qu’elle est prête à s’évanouir et qu’elle la force à s’asseoir. Le vaisseau vogue et s’arrête dans un port de la Bretagne, vers un château parfaitement bien fortifié. Il appartenoit au roi Mériadius[1], qui pour lors étoit en guerre

  1. Mériadus l’un des rois de la Petite-Bretagne. Peut-être faudroit-il lire Méliadus, chevalier de la Table-Ronde, roi du Léonnois dans la Petite-Bretagne et père du célèbre Tristan.

    On aura sans doute observé que ce pays était celui de Gugemer.