Page:Marius Grout - Le vent se lève.djvu/101

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ne sommes que des hommes, et Dieu est Dieu. Je voudrais seulement — comment vous dire ? — me servir d’une comparaison. Ça pourra vous aider un peu. Tenez : quand vous vous regardez dans une glace, vous y voyez votre visage ? Hein ? Tout entier… Bon. Et si je laisse tomber la glace et qu’elle se casse en trois morceaux, dans chacun de ces trois petits morceaux, vous verrez encore votre visage, et tout entier !… Vous comprenez ?… » M. le Curé était entré silencieusement. Il souriait un peu. J’ai clairement vu qu’il me désapprouvait. Il m’a fallu, comme il était là, faire chanter aux enfants le cantique qu’il préfère : « Je mets ma confiance, Vierge, en votre secours… » C’est traînant, et les filles, oui, les filles surtout, traînent encore un plus plus qu’il ne faudrait. M. le Curé s’est assis dans le petit fauteuil de la sacristie. Il baisse la tête et joint les mains. Ma brave femme de mère dirait : « Il boit du lait. »

Il s’approche de moi quand les enfants sont partis, et il me dit : « Mon enfant, n’expliquez pas, je veux dire, n’essayez pas d’expliquer la Sainte-Trinité. Vous êtes plein de bonne volonté, mais c’est par de tels efforts qu’on ruine la foi. Dieu ne nous demande pas de comprendre, il ne nous demande que de croire. Et ces enfants, regardez-les, ils ne demandent aussi qu’à croire. »

Ce même soir, nous sommes retournés chez