Page:Marius Grout - Le vent se lève.djvu/128

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destinés l’un à l’autre… » J’ai prié François d’être prudent quand il parle de Dieu, et de ne point Le mêler si facilement à l’amour profane. Je l’ai invité à se demander si Dieu ne lui proposait pas cet amour comme une tentation. Je lui ai dit : « François, ce n’est pas en acceptant la terre qu’on se sanctifie, c’est en la refusant. » À quoi il a répondu, avec une vivacité étonnante, avec une fougue quasi irrespectueuse et qui m’étonna beaucoup chez lui : « Non, monsieur l’Abbé, c’est en l’acceptant pour l’amour de Dieu. » Quelle confusion ! Je n’ai pas cru devoir répondre. François restait silencieux, têtu. Un moment, il faut que je Je dise, j’eus comme une sorte de haine pour lui. Et maintenant ?

Maintenant, ce n’est pas pour lui que j’ai de la haine, mais pour le démon. Car il est là encore qui rôde. Car il lui faut cette proie que Dieu même s’était réservée. Mais je suis là. Mais vous êtes là, mon Dieu, qui appuyez votre serviteur. Et tu es là aussi, petite colombe de Dieu, et ta pureté même te préservera de toutes embûches…

Je suis ému comme je crois ne l’avoir jamais été. Je crois même que je viens de pleurer. Je ne me souviens pas avoir pleuré depuis mon enfance.

Je vais réciter un chapelet : je ne sais pas de consolation plus grande, ni de meilleur remède au trouble de l’esprit.