Page:Marius Grout - Le vent se lève.djvu/36

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mes responsabilités, mais je suis chef d’établissement, et l’on m’observe. On nous observe, monsieur Rousseau !… Vous me comprenez ?…

« Tenez, parlons à cœur ouvert : voici ce qui s’est passé dans votre classe, il y a deux mois, le 27 novembre : … Vous vous rappelez ?… Quinze jours après, le 13 décembre — il avait neigé ce jour-là — vous vous rappelez… ? Je n’insiste pas. C’est inutilement douloureux… Il faut sévir, monsieur Rousseau, il faut sévir ! Vous disposez de moyens disciplinaires ! Il y a les retenues du jeudi ! Il y a, pour des cas très graves, notre conseil de discipline ! Il y a moi ! Mais oui ! envoyez-moi le loustic, dans mon cabinet ! S’il le faut même, mon cher ami, faites-moi venir ! Je me dérangerai !… Mais, je vous en prie, monsieur Rousseau, restons-en là : je vous en prie, ne m’obligez pas… »

Je ne dis rien. Monsieur le Principal se caresse la barbe et joue négligemment d’un coupe-papier. Je me sens loin. La réalité de tout ça ? Quel jeu jouons-nous ? Car il joue véritablement ! Il ne croit pas un mot de ce qu’il vient de dire ! Et moi j’ai envie de sourire. J’ai envie de dire à Monsieur le Principal : « Allons, mon cher ami (j’ai de la sympathie pour lui aussi), mon cher ami, parlons maintenant de choses sérieuses : comme il fait beau ! N’est-ce pas ? Quel merveilleux printemps ! quelle joie l’on a à vivre ! Hein ! dirons-nous jamais assez qu’il y a de la joie à vivre ?… Et