Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 1.djvu/134

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Annibal, de son rang exagérant l’honneur,
Sème avec la fierté la révolte en son cœur.
Quel que soit le succès qu’Annibal en attende,
Les rois résistent peu quand le Sénat commande.
Déjà ce fugitif a dû s’apercevoir.
Combien ses volontés ont sur eux de pouvoir.

FLAVIUS

Seigneur, à ce discours souffrez que je comprenne.
Que vous ne venez pas pour le seul Artamène,
Et que la guerre enfin que lui fait Prusias
Est le moindre intérêt qui guide ici vos pas.
En vous suivant, j’en ai soupçonné le mystère ;
Mais, Seigneur, jusqu’ici j’ai cru devoir me taire.

FLAMINIUS

Déjà mon amitié te l’eût développé,
Sans les soins inquiets dont je suis occupé.
Je t’apprends donc qu’à Rome Annibal doit me suivre,
Et qu’en mes mains il faut que Prusias le livre.
Voilà quel est ici mon véritable emploi,
Sans d’autres intérêts qui ne touchent que moi.

FLAVIUS

Quoi ! vous ?

FLAMINIUS

Nous sommes seuls, nous pouvons ne rien feindre.
Annibal n’a que trop montré qu’il est à craindre.
Il fuit, il est vaincu, mais vaincu par des coups
Que nous devons encor plus au hasard qu’à nous.
Et s’il n’eût, autrefois, ralenti son courage,
Rome était en danger d’obéir à Carthage.
Quoique vaincu, les rois dont il cherche l’appui