Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/368

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Je vous envoie, madame, la sixième partie de ma Vie ; vous voilà fort étonnée, n’est-il pas vrai ? Est-ce que vous n’avez pas encore achevé de lire la cinquième ? Quelle paresse ! Allons, madame, tâchez donc de me suivre ; lisez du moins aussi vite que j’écris.

Mais, me dites-vous, d’où peut venir en effet tant de diligence, vous qui jusqu’ici n’en avez jamais eu, quoique vous m’ayez toujours promis d’en avoir ?

C’est que ma promesse gâtait tout. Cette diligence alors était comme d’obligation, je vous la devais, et on a de la peine à payer ses dettes. À présent que je ne vous la dois plus, que je vous ai dit qu’il ne fallait plus y compter, je me fais un plaisir de vous la donner pour rien ; cela me réjouit. Je m’imagine être généreuse, au lieu que je n’aurais été qu’exacte, ce qui est bien différent.

Reprenons le fil de notre discours. J’ai l’histoire d’une religieuse à vous raconter : je n’avais pourtant résolu de vous parler que de moi, et cet épisode n’entrait pas dans mon plan ; mais, puisque vous m’en paraissez curieuse, que je n’écris que pour vous amuser, et que c’est une chose que je trouve sur mon