Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/400

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Venez, ma belle enfant, venez, s’écrièrent-elles ; ne vous inquiétez point, vous ne serez pas fâchée d’être parmi nous. Une tourière approcha du carrosse où, la tête baissée, je versais un torrent de larmes.

Allons, mademoiselle, vous plaît-il de venir ? me dit-elle en me donnant la main. Aidez-la de votre côté, ajouta-t-elle à la femme qui m’avait conduite. Et je descendis mourante.

Il fallut presque qu’elles me portassent ; je fus remise pâle, interdite et sans force, entre les mains de ces religieuses, qui de là me portèrent à leur tour jusqu’à une chambre assez propre, où elles me mirent dans un fauteuil à côté d’une table.

J’y restai sans dire mot, toute baignée de mes larmes, et dans un état de faiblesse qui approchait de l’évanouissement. J’avais les yeux fermés ; ces filles me parlaient, m’exhortaient à prendre courage, et je ne leur répondais que par des sanglots et par des soupirs.

Enfin je levai la tête, et jetai sur elles une vue égarée. Alors une de ces religieuses, me prenant la main et la pressant entre les siennes :

Allons, mademoiselle, tâchez donc de revenir à vous, me dit-elle ; ne vous alarmez point, ce n’est pas un si grand malheur que d’avoir été conduite ici. Nous ne savons pas le sujet de votre douleur, mais de quoi est-il question ? Ce n’est pas de mourir ; c’est de rester dans une maison où vous trouverez peut-être plus de douceur et plus de consolation que vous ne pensez. Dieu n’est-il pas le maître ? Hélas ! peut-