Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/168

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ne se fient à rien. Il ne s’était préparé qu’à des respects sans conséquence. Il était d’ailleurs tenté du plaisir présent de vendre bien cher ; et ce neveu, par pure avarice, oublia les intérêts de son avarice même.

Il céda son château, après avoir honteusement chicané sur le prix avec Mme Dursan, qui l’acheta plus qu’il ne valait, mais qui en avait envie, et qui le lui paya sur-le-champ.

Tout l’avantage qu’elle eut dans cette occasion par-dessus une étrangère, ce fut d’être rançonnée avec des révérences, avec des tons doux et respectueux, à la faveur desquels il croyait habilement tenir bon sur le marché, sans qu’elle y prît garde.

Dès le lendemain, elle alla loger dans le château, qu’elle le pria sans façon de lui laisser libre le plus tôt qu’il pourrait, et dont il sortit huit jours après pour s’en retourner chez lui, fort honteux du peu de succès de ses respects et de ses courbettes, dont il vit bien qu’elle avait deviné les motifs, et qui n’avaient servi qu’à la faire rire, sans compter encore le chagrin qu’il eut de me laisser dans le château, où le bonhomme Villot, qui connaissait cette dame, m’avait amenée depuis cinq ou six jours, et où je plaisais, où mes façons ingénues réussissaient auprès de Mme Dursan, qui commençait à m’aimer, qui me caressait, à qui je m’accoutumais insensiblement, que je trouvais en effet bonne et franche, avec qui j’étais le lendemain plus à mon aise et plus libre que la veille, qui de son côté prenait plaisir à voir qu’elle me gagnait le cœur, et qui, pour surcroît de bonne fortune