Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/215

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je le connais, lui et toute sa famille ; il est allié par sa mère aux meilleures maisons de ce pays-ci ; il me vint voir il y a quelques jours ; sa femme et son fils étaient avec lui ; je vous dirai qui ils sont ; je leur offris ma maison, et je travaille même à terminer la malheureuse affaire qui l’a amené ici. Il est vrai, monsieur, que votre père me fit peur avec le visage qu’il avait. Il est hydropique, madame, il est dans l’affliction, et je vous demande toutes vos bontés pour lui ; elles ne sauraient être ai mieux placées, ni plus légitimes. Permettez que je vous quitte, il faut que je le voie.

Oui, madame, répondit ma tante ; allons-y ensemble ; descendons, ma nièce me donnera le bras.

Je ne jugeai pas à propos qu’elle le vît alors ; je fis réflexion qu’en retardant un peu, le hasard pourrait nous amener des circonstances encore plus attendrissantes et moins équivoques pour le succès. En un mot, il me sembla que ce serait aller trop vite, et qu’avec une femme aussi ferme dans ses résolutions et d’aussi bon sens que ma tante, tant de précipitation nous nuirait peut-être, et sentirait la manœuvre ; que Mme Dursan pourrait regarder toute cette aventure-ci comme un tissu de faits concertés, et la maladie de son fils comme un jeu joué pour la toucher ; au lieu qu’en différant d’un jour ou même de quelques heures, il allait se passer des événements qui ne lui permettraient plus la moindre défiance.

J’avais donné ordre qu’on allât chercher un médecin et un prêtre ; je ne doutais pas qu’on n’administrât M.