Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/235

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en cessant de me voir, cesserait aussi de m’aimer avec tant de tendresse, et ne serait plus si difficile à amener à ce qu’elle voulait ; et voici ce qu’elle fit pour parvenir à ses fins.

Je vous ai dit qu’il y avait une espèce de rupture, ou du moins une grande froideur entre Mme Dorfrainville et elle ; et ce fut à moi à qui elle s’en prit. Mademoiselle, me dit-elle, Mme Dorfrainville est toujours votre amie, et n’est plus la mienne ; comment cela se peut-il ? Je vous le demande, madame, lui répondis-je ; vous savez mieux que moi ce qui s’est passé entre vous deux.

Mieux que vous ! reprit-elle en souriant d’un air ironique ; vous plaisantez ; et elle aurait entendu raison si vous l’aviez voulu. Le mariage dont il s’agit n’est pas si pressé.

Il ne l’est pas pour moi, lui dis-je ; mais elle n’a pas cru que ce fût vous qui dussiez le différer, si j’y consentais.

Quoi ! mademoiselle, vous me querellez aussi ? Déjà des reproches du service que vous nous avez rendu ! Cette humeur-là m’alarme pour mon fils, reprit-elle en me quittant.

J’ai vu Brunon me rendre plus de justice, lui criai-je pendant qu’elle s’éloigna ; et depuis ce moment nous ne nous parlâmes presque plus, et j’en essuyai tous les jours tant de dégoûts qu’il fallut enfin prendre mon parti trois mois après la mort de ma tante, et quitter le château, malgré la désolation du fils, que je laissai malade de douleur, brouillé avec