Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/33

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raillent ; en un mot, c’est tout ce qu’il y a de plus mortifiant qu’il faut qu’il essuie ; ce sont des avanies sans fin ; je ne vous en répète pas la moitié. Quoi ! une fille qui n’a rien ! dit-on ; quoi ! une fille qui ne sait qui elle est ! eh ! comment oserez-vous la montrer, monsieur ? Elle a de la vertu ? Eh ! n’y a-t-il que les filles de ce genre-là qui en ont ? N’y a-t-il que votre orpheline d’aimable ? Elle vous aime ? Eh ! que peut-elle faire de mieux ? Est-ce là un amour si flatteur ? Pouvez-vous être sûr qu’elle vous aurait aimé, si elle avait été votre égale ? A-t-elle eu la liberté du choix ? Que savez-vous si la nécessité où elle était ne lui a pas tenu lieu de penchant pour vous ? Et toutes ces idées-là vous viendront quelque jour dans l’esprit, ajoute-t-on malignement et sottement ; vous sentirez l’affront que vous vous faites à présent, vous le sentirez ; et du moins allez vivre ailleurs, sortez de votre pays, allez vous cacher avec votre femme pour éviter le mépris où vous tomberez ici : mais n’espérez pas, en quelque endroit que vous alliez, d’éviter le malheur de la haïr, et de maudire le jour où vous l’avez connue.

Oh ! je n’en pus écouter davantage ; je m’étais tue