Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1827, tome 8.djvu/112

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n’aurais pas été si embarrassé, si je n’avais point eu peur de l’être.

Or j’avais par mégarde emporté la tabatière de Mme de la Vallée, je la sentis dans ma poche, et pour occuper mes mains, je me mis à l’ouvrir et à prendre du tabac.

À peine l’eus-je ouverte, que Mme de Fécour, qui jetait sur moi de fréquents regards, et de ces regards qu’on jette sur quelqu’un qu’on aime à voir ; que Mme de Fécour, dis-je, s’écria : Ah ! monsieur, vous avez du tabac, donnez-m’en, je vous prie, j’ai oublié ma tabatière ; il y a une heure que je ne sais que devenir.

Là-dessus, je me lève et lui en présente ; et comme je me baissais afin qu’elle en prît, et que, par cette posture, j’approchais ma tête de la sienne, elle profita du voisinage pour m’examiner plus à son aise, et en prenant du tabac leva les yeux sans façon sur moi, et les y fixa si bien que j’en rougis un peu.

Vous êtes bien jeune pour vous accoutumer au tabac, me dit-elle ; quelque jour vous en serez fâché, monsieur, il n’y a rien de si incommode ; je le dis à tout le monde, et surtout aux jeunes messieurs de