Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1827, tome 8.djvu/197

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beaucoup d’estime pour sa figure, et il n’y a rien là d’étonnant : il n’est pas rare qu’une maîtresse coupable en devienne plus piquante. Vous croyez à présent que je poursuis mon chemin, et que je retourne chez moi ; point du tout, une nouvelle inquiétude me prend. Voyons ce qu’ils deviendront, dis-je en moi-même, à présent que je les ai interrompus ; je les ai quittés bien avancés ; quel parti prendra-t-elle, cette femme ? Aura-t-elle le courage de demeurer ?

Et là-dessus, j’entre dans l’allée d’une maison éloignée de cinquante pas de celle de la Remy, et qui était vis-à-vis la petite rue où Mme de Ferval avait laissé son carrosse. Je me tapis là, d’où je jetais les yeux tantôt sur cette petite rue, tantôt sur la porte par où je venais de sortir, toujours le cœur ému ; mais ému d’une manière plus pénible que chez la Remy où j’entendais du moins ce qui se passait, et entendais si bien que c’était presque voir ; ce qui faisait que je savais à quoi m’en tenir. Mais je ne fus pas longtemps en peine, et je n’avais pas attendu quatre minutes, quand je vis Mme de Ferval sortir de la porte du jardin, et rentrer dans son carrosse. Après quoi parut de l’autre côté mon homme qui entra dans le sien, et que je vis passer. Ce qui me calma sur-le-champ.