Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1827, tome 8.djvu/205

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elles tombaient sur ce mariage tardif, et qu’elles la harcelaient sur son âge.

Mais, mon Dieu ! madame, lui répondit-elle d’un ton doux et brusque ; Je conviens que j’ai bien choisi, je suis fort satisfaite de mon choix, et très ravie qu’il vous plaise. Au surplus, je ne me suis pas mariée si tard, que je ne me sois encore mariée fort à propos, ce me semble, on est fort bonne à marier à mon âge ; n’est-ce pas, mon ami ? ajouta-t-elle en mettant sa main dans la mienne, et en me regardant avec des yeux qui me disaient confidemment : Tu m’as paru content.

Comment donc, ma chère femme, si vous êtes bonne ! répondais-je ; et à quel âge est-on meilleure et plus ragoûtante, s’il vous plaît ? Là-dessus, elle souriait, me serrait la main, et finissait par demander, presque en soupirant : Quelle heure est-il ? pour savoir s’il n’était pas temps de sortir de table : c’était là son refrain.

Quant à l’autre petite personne, la fille de Mme d’Alain, je la voyais qui, d’un coin de l’œil, observait notre chaste amour, et qui ne le voyait pas, je pense, d’un regard aussi innocent qu’il l’était. Agathe avait le bras et la main passables, et je remarquais que la friponne jouait d’industrie pour les mettre en vue le plus qu’elle pouvait, comme si elle avait voulu me dire : Regardez, votre femme a-t-elle rien qui vaille cela ?

C’est pour la dernière fois que je fais ces sortes de détails ; à l’égard d’Agathe, je pourrai en parler encore ;