Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/32

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La Fée.

Où est-il à présent ?

Trivelin.

Je crois qu’il joue au volant dans les prairies ; mais j’ai une nouvelle à vous apprendre.

La Fée.

Quoi ? qu’est-ce que c’est ?

Trivelin.

Merlin est venu pour vous voir.

La Fée.

Je suis ravie de ne m’y être point rencontrée ; car c’est une grande peine que de feindre de l’amour pour qui l’on n’en sent plus.

Trivelin.

En vérité, madame, c’est bien dommage que ce petit innocent l’ait chassé de votre cœur. Merlin est au comble de la joie ; il croit vous épouser incessamment. Imagines-tu quelque chose d’aussi beau qu’elle ? me disait-il tantôt, en regardant votre portrait. Ah ! Trivelin, que de plaisirs m’attendent ! Mais je vois bien que de ces plaisirs-là, il n’en tâtera qu’en idée ; et cela est d’une triste ressource, quand on s’en est promis la belle et bonne réalité. Il reviendra ; comment vous tirerez-vous d’affaire avec lui ?

La Fée.

Jusqu’ici je n’ai point encore d’autre parti à prendre que de le tromper.

Trivelin.

Et n’en sentez-vous pas quelque remords de conscience ?