Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/74

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plus raisonnable. Eh bien ! Jacqueline, c’est donc pour lui que tu as le cœur tendre ?

Jacqueline.

Oui, monsieur, il y a bien deux ans en çà que ça m’est venu… Mais, dis toi-même ; je ne sis pas assez effrontée de mon naturel.

Pierre.

Monsieur, franchement, c’est qu’alle me trouve gentil ; et si ce n’était qu’alle fait la difficile, il y aurait longtemps que je serions ennocés.

Lélio.

Tu es fou, maître Pierre, ta Jacqueline au premier jour te plantera là ; crois-moi, ne t’attache point à elle. Laisse-la là, tu cherches ton malheur.

Jacqueline.

Bon ! voilà de biaux contes qu’vous li faites là, monsieur ! Est-ce que vous croyez que je sommes comme vos girouettes de Paris, qui tournent à tout vent ? Allez, allez ! si queuqu’un de nous deux se plante là, ce sera li qui me plantera, et non pas moi. À tout hasard, notre monsieur, donnez-moi tant seulement une petite parmission de mariage ; c’est pour ça que j’avons prins la liberté de vous attaquer.

Pierre.

Oui ; voilà tout fin dret ce que c’est, et Jacqueline a itou queuque doutance que vous vourez bian de votre grâce, et pour l’amour de son sarvice, et de sti-là de son père et de sa mère, qui vous ont tant sarvi quand ils n’étiont pas encore