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Page:Marivaux - Théâtre, vol. II.djvu/549

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Angélique.

Tout de bon ! Et moi, trop enchantée de vous y voir pendant toute la mienne. Continuez.

Dorante.

Je n’ose plus vous répondre, madame.

Angélique.

Pourquoi ? Je parle votre langage ; je réponds à vos exagérations par les miennes. On dirait que votre souverain bonheur consiste à ne me pas perdre de vue et j’en serais fâchée. Vous avez une douleur profonde pour avoir pensé à un mariage dont je me contente de rire ; vous montrez une tristesse mortelle, parce que je vous empêche de répéter ce que Lisette m’a déjà dit. Eh mais ! vous succomberez sous tant de chagrins ; il n’y va pas moins que de votre vie, s’il faut vous en croire.

Dorante.

Souffrirez-vous que je parle, madame ? Il n’y a rien de moins incroyable que le plaisir infini que j’aurais à vous voir toujours, rien de plus croyable que l’extrême confusion que j’ai de vous avoir indisposé contre moi, rien de plus naturel que d’être touché autant que je le suis de ne pouvoir du moins me justifier auprès de vous.

Angélique.

Je les sais vos justifications ; vous les mettriez en plusieurs articles, et je vais vous les réduire en un seul ; c’est que celui que vous me proposez est extrêmement riche. N’est-ce pas là tout ?