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UNE SEMAINE D’OURAGAN RÉVOLUTIONNAIRE

au canon, font le service d’ordre, difficile à cause de l’affluence inusitée qu’attire cette séance, l’une des plus mémorables de la Révolution. Voici les députés paysans que la foule salue de ses hourrahs : ceux des Cosaques, dont plusieurs ont revêtu la tcherkesha traditionnelle ; les paysans grands-russiens à barbes d’apôtres et aux yeux bleus ; les steppiens plus secs, au visage hâlé par le vent. Beaucoup sont en costume militaire et arborent des croix sur leur poitrine. Au-dessus des têtes coiffées de bonnets, de chapeaux, de casquettes ou de papakhs (bonnets de fourrure) flottent, plus joyeux et frémissants que jamais, les drapeaux de la Révolution. Mais on regrette de ne pas voir un seul drapeau national mêler ses trois couleurs au rouge éclat des emblèmes révolutionnaires dans cette manifestation qui est, par excellence, la fête de toute la Russie.

Dans la salle d’opéra, le spectacle est extraordinaire : les drapeaux à hampes et franges d’or, à inscriptions blanches sur fond rouge, à peintures symboliques, émergent de l’océan moutonnant des têtes. Sur les balcons une foule s’entasse, se presse