Page:Marmontel - Mémoires d un père, Didot, 1846.djvu/37

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              DE MARMONTELL.                         29 

JV.tais (lu nombre de ceux qui étaient moulés à Tliorloge ; et lui ayant répondu que j’y étais monté , il me marqua du doigt ma place dans le cercle de mes complices , et se mit à poursuivre son exécution. Vous croyez bien que ma résolution de lui échapper fut bientôt prise. Je saisis le moment où il tenait une de ses victimes qui se débattait sous sa main , et tout d’un temps j’ouvris la porte et je m’enfuis. Il s’élança pour m’ attraper ; mais il manqua sa proie , et j’en fus quitte pour un pan d’habit déchiré.

Je me réfugiai dans ma classe, où le régent n’était pas encore. Mon habit déchiré , mon trouble, la frayeur ou plutôt l’indignation dont j’étais rempli, me tinrent lieu d’exorde pour m’attirer l’attention. « Mes amis,.m’écriai-je, sauvez-moi, sauvez-vous des mains d’un furieux qui nous poursuit ! C’est mon honneur et c’est le vôtre que je vous recommande et que je vous donne à garder. Peu s’en est fallu que cet homme injuste et violent , ce P. Bis , ne vous ait fait en moi le plus indigne outrage, en flétrissant du fouet un rhétoricien ; il n’a pas même daigne me dire de quoi il voulait me punir : mais, aux cris des enfants qu’il faisait écorcher, j’ai entendu qu’il s’agissait d’avoir détraqué une horloge, accusation absurde, et dont il sent la fausseté ; mais il aime à punir, il aime à s’abreuver de larines ; et l’innocent et le coupable , tout lui est égal , pourvu qu’il exerce sa tyrannie. Mon crime à moi, mon crime ineffaçable, et qu’il ne peut me pardonner, est de n’avoir jamais voulu vous trahir pour lui plaire , et d’avoir mieux aimé endurer ses rigueurs que d’y exposer mes amis. Vous avez vu avec qnelle obstination il s’est efforcé depuis trois ans à faire de moi l’espion et le délateur de ma classe. Vous seriez effrayés de l’énormité du travail dont il m’a accablé, pour arracher de moi des notes qui lui. donnassent tous les jours le plaisir de vous molester. Ma constance a vaincu la sienne, sa haine a paru s’assoupir ; mais il épiait le moment de se venger sur moi , de se venger sur vous, de la fidélité que je vous ai gardée. Oui , mes amis , si j’avais été assez craintif ou assez faible pour lui laisser porter les mains sur moi, c’en était fait, la rhétorique était déshonorée, et déshonorée à jamais ! C’est là ce qu’il s’était promis. Tl voulait qu’il fVit .