avait eu de Marie-Marthe Sibourg une fille, qui avait déjà quinze ans en 1690[1], et de Marianne Pajot un fils, qui en avait treize ou quatorze[2]… Faut-il croire que Lassay mettait, comme certaines femmes, de la coquetterie à cacher qu’il eût — déjà — de grands enfants ? De fait il cherchait à se remarier… Mais La Bruyère pouvait-il prévoir que cet « homme de ville » (car Lassay n’était pas encore, à cette date, rentré au service du roi) épouserait en effet, quelques années plus tard, une fille de Monsieur le Prince ? — C’est pourtant ce qui arriva.
Le fils du grand Condé avait eu de la comtesse de Marans une fille naturelle, Julie de Chateaubriant, qui, élevée à Maubuisson, puis légitimée, avait, en 1694, vingt-six ans. Elle était fort jolie, dit Saint-Simon, et avait beaucoup d’esprit[3]. Voilà donc Lassay amoureux une fois de plus (ainsi le voulait son étoile). Ce ne fut pas de Julie que vinrent les résistances : elle fut sans doute flattée de l’hommage d’un cœur dont on vantait les conquêtes. En revanche, le père hésita longtemps la petite noblesse du prétendant et sa réputation de « galant des Tuileries » ne le lui faisaient pas souhaiter pour gendre. Il fallut que Mme de Maintenon s’en mêlât : à sa prière, le roi fit savoir que ce mariage lui agréait et octroya à Lassay la lieutenance générale des pays de Bresse, Bugey, Valromey et Gex, qui valait, affirme Dangeau,
- ↑ Adélaïde-Marie-Constance de Madaillan de Lesparre, dite Mlle de Lassay-Montataire, mariée en cette même année 1690 au comte de Coligny. Morte en 1725.
- ↑ Léon de Madaillan de Lesparre, comte, puis marquis de Lassay. Voir supra, p. 9. Marié en 1711 à sa tante consanguine Reine de Madaillan : mort en 1750.
- ↑ III, p. 28. — M. de Ségur : Un héros de roman au grand siècle, Revue de Paris, 15 mars 1901, p. 314 sq.