était en garnison à Fontainebleau, et sa fille, alors âgée de dix-neuf ans, demeurait avec son père. Il y avait donc habituellement à table M. et Mlle des Touches, MM. Oudard, secrétaire intime du préfet, Alexandre de Fleury, et moi.
Fleury était venu à la préfecture un an après mon arrivée, pour y faire comme moi son apprentissage administratif. Il était fils d’un ancien sous-préfet de Senlis, qui avait vécu dans l’intimité de Joseph Bonaparte lorsque ce prince habitait le château de Chantilly. M. de Fleury père, que j’ai vu plusieurs fois à Versailles, était un homme de mérite, de manières excellentes, et d’un esprit aimable et fin. Je me rappelle très bien qu’il racontait dans la perfection les historiettes les plus hasardées, et qu’il savait trouver des mots très pittoresques mais très décents pour exprimer des idées qui ne l’étaient pas.
M. de Fleury avait les pieds d’une extrême difformité, et les ondulations montagneuses de ses bottes, coupées en plusieurs endroits, trahissaient un potager dont la plupart des légumes étaient fort indiscrets.
Voici ce que j’ai lu dans les Mémoires de M. Stanislas de Girardin, au sujet d’un voyage qu’il fit à Chantilly, en août 1809 :
« J’ai, dit-il, passé à Senlis, pour y prendre M. Fleury, le sous-préfet. J’ai servi avec lui dans le Colonel-Général-Dragons, je le connais depuis 1778, c’est-à-dire depuis plus de trente ans. Une liaison si ancienne est devenue une vieille amitié. Fleury a