été le confident ou le témoin d’une foule d’intrigues de boudoir qu’il racontait avec une finesse et une grâce charmantes. Nul, au surplus, ne connaissait mieux que lui la généalogie des grandes maisons et les anecdotes scandaleuses des familles.
Vieux garçon sans fortune, il s’était retiré à Versailles dans un très modeste appartement qu’il n’occupait jamais que la nuit, car toutes les heures de la journée étaient employées par ce joyeux viveur en visites, en promenades et en parties de plaisir dont il était toujours l’acteur principal. Il avait son couvert mis chez les personnes les plus distinguées de la ville, quelles que fussent d’ailleurs leurs opinions politiques, et il venait dîner une fois au moins par quinzaine à l’hôtel de la préfecture, où il payait très généreusement son écot en causeries vives, piquantes, parsemées de mots heureux et d’à-propos d’une originalité grivoise mais de bon goût qui n’appartenait qu’à lui.
M. des Touches n’aimait pas qu’on allât sur le théâtre faire les aimables avec les actrices. Il disait toujours à mon collègue Alexandre de Fleury et à moi : « Voyez ces dames chez elles tant que vous le voudrez, mais ne vous montrez jamais en public avec elles. » Cette observation était parfaitement juste et convenable, mais, avec la facilité que nous avions de descendre pour ainsi dire de la loge même de la préfecture dans les coulisses, comment résister, à vingt ans, à l’herbe tendre, quand on n’a qu’à se baisser « pour tondre de ce pré, la largeur de sa langue ? » Et