ministre baissa les lunettes sur son nez et me fouilla, en plein visage, d’un regard scrutateur que je soutins bravement, sans baisser les yeux.
« Monsieur le ministre, je suis chargé de remettre à vous seul une dépêche importante de la part de mon préfet, M. le comte d’Orfeuil, préfet du Jura. »
« Donnez, monsieur le sous-préfet. »
Le ministre ouvre la lettre et la lit avec une grande attention, puis, après l’avoir achevée, il me dit :
« Cette lettre est fort honorable pour vous, et je suis heureux de connaître par moi-même un fonctionnaire si favorablement apprécié et qui donne de si précieuses garanties à l’administration et au gouvernement ; mais je dois vous déclarer avec franchise que j’ai des engagements sérieux avec le Constitutionnel pour la première préfecture vacante. »
« Mais, monsieur le ministre, si vous faites préfets les rédacteurs de journaux qui déclarent la guerre au gouvernement, ne craignez-vous pas que la presse ne devienne pour vous une sorte d’hydre de Lerne, qui doublera ses têtes à chaque vacance d’une préfecture ? »
« Je ne le pense pas ; mais, au surplus, j’examinerai