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Page:Marteilhe - La vie aux galères, 1909.djvu/111

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les galères de dunkerque

de Harwich, outre un renfort de soldats pour soutenir la descente.

Tout étant préparé, un beau matin, 5 septembre, nous mîmes en mer, avec un temps à souhait pour les galères. Un petit vent de nord-est nous favorisa si bien qu’à petites voiles nous arrivâmes à l’embouchure de la Tamise, sans ramer, à environ cinq heures du soir. Mais Smit, jugeant qu’il était de trop bonne heure et qu’on pourrait nous découvrir, ce qui gâterait tout, ordonna de nous retirer plus haut en mer pour attendre la nuit, afin de faire sa descente. Nous n’eûmes pas resté un quart d’heure à la cape que la sentinelle, que nous avions à la découverte en haut de notre grand mât, cria : « Navire. — Et où ? lui demanda-t-on. — Au nord. — Quelle route ? — À l’ouest, dit-il. — De quelle fabrique ? — Trente-cinq navires marchands et une frégate d’environ trente-six canons, qui paraît leur servir d’escorte », répondit la sentinelle. En effet, c’était une flotte marchande, sortie du Texel, faisant route pour la Tamise. Notre commandant tint d’abord conseil de guerre, où il fut conclu que, sans s’arrêter à l’expédition de Harwich, on tâcherait de se rendre maître de cette flotte, qui était plus intéressante pour le roi que de brûler Harwich. Il ne se présentait pas tous les jours une occasion de faire un si riche butin, mais tous les jours on pourrait entreprendre l’expédition de Harwich. Le commandant alléguait toutes ces raisons au capitaine Smit, lequel pestait et protestait contre la conclusion du conseil de guerre. Le conseil de guerre tint ferme dans sa résolution, étant secrètement bien aise qu’il y eût une occasion de faire échouer l’expédition de Harwich par la jalousie qu’ils avaient de suivre les ordres de Smit. Après l’issue du conseil où chaque capitaine des galères reçut les ordres du commandant pour l’attaque de cette flotte, nous fîmes force de voiles et de rames pour aller à sa rencontre, et comme elle venait à nous, et nous à elle, nous fûmes bientôt tout près les uns des autres. Notre commandant avait ordonné de telle sorte sa division que quatre galères devaient investir, autant que possible, les navires mar-