Page:Martel - Les Cévennes et la région des causses, 1893.djvu/124

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
115
montpellier-le-vieux

L’étymologie du nom est bien simple : frappés par la disposition artificielle et architecturale des rochers, les pâtres les comparèrent à ce qu’ils avaient vu dans les édifices du chef-lieu de l’Hérault, la plus grande ville de la contrée et pour eux la cité par excellence ; de là vint font naturellement la dénomination de Montpellier, à laquelle l’idée de ruine, de destruction, fit joindre l’épithète de le Vieux.

La comparaison fut d’autant plus spontanée que le surnom patois de la ville humaine est « lou clapas », ce qui, mot à mot, veut dire tas de pierres.

Aussi les bergers du bas Languedoc qui viennent, l’été, chercher sur le Larzac d’excellents herbages pour leurs troupeaux chassés des rivages méditerranéens par la chaleur et la poussière, apercevant de loin et au nord de la Dourbie l’immense « tas de pierres », semblable à un amoncellement de monuments détruits, le baptisèrent-ils, sans grand effort d’imagination, « Montpellier-lou-Viel ». Le plan cadastral a appliqué ce nom à l’un des cirques, celui des Rouquettes.

Vues à distance, ces roches, groupées en amphithéâtre autour d’un triple piton, qui les domine comme les tours d’une cathédrale, font bien l’effet d’une vieille cité morte.

Venons aux voies d’accès et aux sentiers. Pour arriver dans Montpellier-le Vieux on a le choix entre plusieurs routes : Maubert au nord ; Valat-Nègre à l’ouest ; Doul, Canazels, la Combe au sud ; Riou-Sec et Bouxés à l’est ; chacune de ces routes amène en un point différent de l’enceinte. Deux seulement sont aisément praticables à mulet : celle de Maubert et celle de la Combe (qui monte du village de la Roque-Sainte-Marguerite) ; les autres se transforment par places en sentiers de chèvres, très accessibles, mais pas toujours faciles à trouver sans guide. C’est quand on arrive par Maubert et la citadelle que la première impression est le plus saisissante. Toutefois l’ascension par la Roque et la Combe reste seule vraiment commode en venant de la Dourbie. — Sur les pentes extérieures, en dehors de l’enceinte des grands cirques, il y a de bons chemins accrochés aux parois du causse, raccordant tous les précédents et présentant de splendides points de vue sur le fossé de la Dourbie, ainsi que de bizarres figures naturelles dans les rocs isolés, ouvrages avancés et détachés de la muraille de la ville ; nous les indiquerons plus bas, dans l’itinéraire. — À l’intérieur, on peut, en principe, passer partout, par-dessus tous les cols, à travers toutes les fentes, entre tous les rochers : je n’ai trouvé que six grandes brèches infranchissables ; encore, quelques coups de faux parmi les houx, les genêts et les ronces, en dégageraient-ils bien deux ou trois. De même, les principaux sommets se laissent presque tous escalader : trois ou quatre seulement font exception. Il va sans dire que pour se glisser et se hisser ainsi partout, gymnastique et agilité sont de rigueur ; mais cet amusement n’est pas indispensable pour connaître à fond Montpellier-le-Vieux ; même sans descendre de mulet, on en verra les plus belles parties. C’est, en somme, une excursion très facile, sans fatigue et sans danger, qui demande seulement une belle et longue journée.

Après l’abus qui vient d’être et qui sera fait encore ci-après des qualificatifs élogieux et des épithètes admiratives, il importe de prévenir les touristes qu’une déception peut-être les attend à Montpellier-le-Vieux.

Depuis dix ans maintenant que le site est connu, décrit et parcouru, il s’est rencontré plus d’un visiteur qui n’a nullement partagé l’enthousiasme des premiers explorateurs : l’un, botaniste, contrarié sans doute de ne pouvoir atteindre