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cévennes et camisards

Aussi certains étymologistes ont-ils cru que les Romains l’avaient nommée la fleur des eaux (Flos aquarum), d’où Florac. Plus simplement, M. Germer-Durand fait dériver ce nom de Floriacum, villa de Florus (alt. 583 m.).

Il n’y a point de curieux monuments à Florac, sauf la façade du couvent de la Présentation (1583). Pendant la guerre des Camisards, une chambre ardente y jugeait les rebelles. Une grande partie des habitants pratique encore la religion réformée. Le vallon de Florac produit beaucoup de fruits.

Au contact des schistes et du calcaire, plusieurs sources jaillissent, inondantes après les grandes pluies seulement ; celle des Fouzes (650 m. d’alt.) gonfle la Mimente au lendemain des jours d’orage.

De Florac en Gévaudan conduit une des routes des Causses les plus riches en beaux points de vue, celle du col de Montmirat. Passant le Tarn à 536 mètres, au moment où elle laisse à droite la double voie du Pont-de-Montvert (V. p. 244), elle commence son escalade à 5 kilomètres de Florac. à ce point bifurque vers la gauche la route d’Ispagnac et de Sainte-Énimie. On s’élève doucement, ayant à l’est l’Eschino d’Ase (dos d’âne) (1,235 m.), masse calcaire superposée à un promontoire du mont Lozère, et le causse de Sauveterre à l’ouest ; entre eux, et en contre-bas de la chaussée, le regard plonge charmé dans les profonds valats d’Ispagnac, jamais visités quoique ravissants.

Les touristes qui descendent le Tarn de Florac à Ispagnac passent à côté. Il faut, pour les voir, quitter la route départementale à 1,500 mètres environ avant Ispagnac, au pont du Cantonnet, et s’engager dans le défilé qui s’ouvre au nord comme une profonde déchirure. Là sont les valats, ces petites vallées resserrées, déclives, sinueuses, allongées depuis le sommet de la montagne jusqu’aux bords de la rivière.

Un chemin communal bien entretenu conduit au village de Lonjagnes et aux hameaux du Marazel et de Nozières. On marche à l’ombre sous les châtaigniers, le long des prairies en pente ; à droite, le ruisseau des Combes murmure dans d’énormes blocs granitiques, qui contrastent bizarrement avec les roches calcaires ou schisteuses.

Les arbres les plus variés, le pied dans l’eau, gardent tout l’été leur feuillage frais et touffu. Les oiseaux jasent sous les branchages.

Plus haut, le ruisseau prend une allure rapide ; il glisse, écumant, étroit, dans la pierre dure ; les grands rochers escarpés de Vaissy dominent les monticules intermédiaires et séparent les valats de Lonjagnes de ceux de Nozières. Une muraille est debout au bord de l’abîme : ce sont les ruines du château de Vaissy et de sa chapelle Saint-Sauveur, château démantelé, abandonné, écroulé pierre à pierre. Autour et au pied du dernier pan de mur, des restes de masures grossières se distinguent au milieu d’un chaos de pierres ; là les habitants du voisinage se réfugiaient sous la protection du château. Ces valats méritent d’être parcourus.

De la route on en domine l’ensemble, on entend leurs eaux joyeuses, mais on ne saurait goûter le charme de leurs détails à la fois champêtres et alpestres.

Presque sans trêve, la bise souffle au seuil étroit du col de Montmirat (1,046 m.), d’où une route transversale gagne Runes par les dernières croupes de la Lozère, en s’élevant jusqu’à 1,240 mètres. Le col est une porte que l’on franchit et qui, refermée derrière le voyageur, ne laisse plus rien soupçonner du Tarn. De tout temps ce fut un débouché des Cévennes. D’une mine de plomb récem-