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le gévaudan

Finies sont les merveilles des Causses, bien que quelques plateaux encore doivent se présenter à nous sous ce nom ; mais dans le nord-ouest de la Lozère, autour de Mende et sur l’Aubrac, il nous reste plusieurs curiosités à voir, qui, pour moins insolites, ne sont ni moins intéressantes ni plus connues.

Mende, la Mimate ou Memmate ou Mimatensis mons de Grégoire de Tours, en qualité de préfecture nantie d’un chemin de fer, n’a droit ici qu’à quatre lignes : évêché ; 8,033 habitants (5,749 aggl.) ; 739 mètres d’altitude ; ravissante situation entre le Lot et le causse de Mende, qui la domine de 350 mètres ; deux beaux clochers Renaissance à la cathédrale ; préfecture (ancien évêché) brûlée, avec sa galerie de portraits des évêques, en 1886 ; ermitage Saint-Privat ; ruelles sales, belles allées de platanes et éclairage à la lumière électrique. Demandez le reste au Guide Joanne.

C’est la capitale du Gévaudan, l’ancien pays des Gabales, le Pagus Gabalicus, Gabalitanus, Gavelitanus, Gavaldanus, le Gabauldan, où les évêques de Mende acquirent, à la fin du xie siècle, avec le titre de comte, le droit d’exercer dans leur diocèse l’autorité temporelle. Plus tard ils partagèrent ce droit avec les rois de France, et, jusqu’à la Révolution, dans les bailliages du pays on rendait la justice tour à tour au nom du souverain et de l’évêque. Le Gévaudan enfin eut ses états particuliers, qui siégèrent alternativement à Mende et à Marvejols.

« Ainsi appelait-on ce territoire avant 1789, ainsi l’appellera-t-on longtemps, ou toujours, en dehors du style administratif et fiscal. — Il y a cent cinquante ou deux cents ans, ce pays avait plus de villages, des villages plus grands ; et des hameaux y sont devenus ruine, ou maison seule, ou simple souvenir, et même oubli. Dans la Lozère, deux choses ont diminué : les sylves et les fonts. Jadis telle source cévenole bramait toute l’année, pour parler avec le patois de ces lieux, c’est-à-dire qu’elle chantait ou du moins murmurait sous un dais de feuillage ; maintenant elle tarit en été dans son pli chauve et fauve, au pied d’un talus désossé, d’un éboulis, d’un roc que le soleil écaille dès que la neige ne le glace plus, intus ad ossa. » (O. Reclus.)

L’ermitage Saint-Privat a sa légende aussi. Au ve siècle, en 408, les Vandales, menés par Crocus et venant de ravager la Lyonnaise et l’Auvergne, entrèrent en Gévaudan, dont saint Privat était évêque : évêque ayant pour richesses le cilice qui le couvrait, et pour palais une grotte du causse. Maîtres de Javols (Anderitum), alors capitale des Gabales, les barbares sommèrent le saint d’inviter ses fidèles à leur livrer le Gredonense castrum (Grèzes) (V. chap. XXVIII), qui leur tenait encore tête. Son refus lui valut le martyre : la tradition veut que, nouveau Régulus, il ait été roulé au pied de la montagne dans un tonneau intérieurement hérissé de pointes acérées et de lames tranchantes ; la chronique, plus banale, le fait succomber sous le glaive. La famine délivra le Gévaudan des barbares ; les


    de 1306 ; 3 feuilles in-fol. (s.l.n.d.) du xviie siècle ; — Documents historiques sur la province du Gévaudan, par Gustave de Burdin, archiviste ; Toulouse, imprimerie de P. Lachapelle, 1866-1867 ; 2 vol. in-8o ; — Vie de saint Privat, martyr, premier évêque et patron du Gévaudan, par l’abbé Rabeyrolle, vicaire général ; Paris, 1837, in-8o ; — Vie de saint Privat et guide du pèlerin à sa grotte, par l’abbé Rigal ; Bar-le-Duc, 1875, in-8o ; — Actes sur la passion et les miracles de saint Privat, recueillis dans un manuscrit latin depuis 1171 jusqu’en 1360. Extrait des Archives de la Lozère, par l’abbé Baldit, archiviste ; Bull. de la Lozère, 1852, p. 57 ; — Gabalum christianum ou Recherches historicocritiques sur l’Église de Mende, aujourd’hui département de la Lozère, par l’abbé J.-B.-E. Pascal ; Paris, chez Dumoulin, 1 vol. in-8o, 1853 ; — L’Église de Mende et ses premiers évêques, étude critique par le P. Gaydou ; Bull. de la Lozère, 1855-1856, p. 210 et 282 ; et 1856, p. 85 et 208 ; — Origine et histoire abrégée de l’Église de Mende, par l’abbé J. Charbonnel; Mende, in-8o, impr, Privat, 1859.