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Page:Martel - Les Cévennes et la région des causses, 1893.djvu/358

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les cévennes

Comme sources-rivières formées sous terre (on ne sait au pas juste comment), il faut noter en France :

Vaucluse d’abord, l’illustre fontaine célébrée par Pétrarque et qui a fait nommer sources vauclusiennes tous les ruisseaux qui sortent comme elle d’une gueule de caverne[1] ;

Ensuite, en Dauphiné, dans les Alpes de l’Isère, Sassenage et la Balme ;

Dans le Jura et la Franche-Comté, la Loue, la Dessoubre, le Lison, la Cuissance, la Seille, etc. ;

Puis les sources des Causses : celles riveraines du Tarn (Castelbouc, Saint-Chély, etc.), les Douzes, la Sorgues, la Vis, le Durzon, etc. ;

Enfin celles du Quercy (causse de Gramat), tributaires de la Dordogne.

La rivière souterraine de Padirac est la première, croyons-nous, dont on ait trouvé la source intérieure même dans les entrailles du sol. Mais elle est sans débouché. (V. p. 82.)

Quand on entreprendra, avec les moyens d’investigation nécessaires, la pénétration méthodique de toutes celles de ces sources qui peuvent donner passage à un bateau, on fera des découvertes aussi précieuses pour les savants qu’attrayantes pour le touriste.

Aux rivières souterraines se rattache l’étude de ces curieux trous qui, comme la Poik-Hœhle ou le puits de Trebiciano, sont pratiqués à la surface des plateaux calcaires : ce sont les avens[2] des Causses (V. p. 77), les embues, boistout, anselmoirs, scialets, bétoires, tindouls, fontis, entonnoirs, ragagés, abîmes, gouffres, puits, igues et cloups des diverses régions de France ; les foibe, trichter ou dolinas du Karst ; les sink-holes ou swallow-holes d’Angleterre et des États-Unis ; les Ponors des Slaves ; les katavothres de Grèce.

Voyons un peu ce que nous disent les auteurs à leur sujet :

Et d’abord Élisée Reclus :

« En amont des sources, le cours des ruisseaux souterrains est le plus souvent indiqué par une série de gouffres ou puits naturels ouverts au-dessus de l’eau courante. Les voûtes des grottes intérieures n’étant pas toujours assez fortes pour supporter le poids des masses surincombantes, elles doivent, en effet, s’écrouler çà et là. C’est ainsi que se forment, au-dessus des ruisseaux cachés, ces espèces de puits que l’on désigne dans chaque pays par les noms les plus divers.

« C’est par ces gouffres naturels que l’on peut atteindre les rivières souterraines et se rendre compte de leur régime. » (La Terre, t. Ier, p. 350.)

L’abbé Paramelle émet les mêmes idées sur la production de puits par effondrement et sur le jalonnement des cours d’eau souterrains par des bétoires. (L’Art de découvrir les sources, chap. XX.)

Il est constant que l’on a vu des gouffres se former dans des terrains notoirement caverneux et sillonnés de courants intérieurs inconnus : ainsi, en 1783 des affaissements se produisirent à neuf lieues en amont de Vaucluse, et pendant plusieurs jours la fontaine fut troublée. — En 1880, sur le causse de Mende, il s’est ouvert un vaste avenc, « par l’enfoncement d’un rocher, sorte de clef de voûte

  1. Beaucoup de ces cavernes sont impénétrables (Vaucluse, Sorgues de l’Aveyron, Pêcher de Florac, etc.), parce que l’eau occupe la section des galeries de projection : à Vaucluse, en 1878, un plongeur vêtu d’un scaphandre a pénétré à 20 mètres sous l’eau dans un siphon descendant. V. Bouvier, Assoc. franç. pour l’avancement des sciences, p. 348 ; Montpellier, 1879. D’autres, au contraire, sont ouvertes en larges voûtes.
  2. Le mot avenc vient du celtique avain, qui veut dire ruisseau (avin en Écosse et Mande, awen dans la basse Bretagne). (Daubrée, Eaux souterraines, t. Ier, p. 297.)