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le cañon du tarn. — de la malène au rozier

Georges-de-Lévejac. Depuis longtemps déjà ou pressent un nouveau changement de décor, qui s’effectue enfin sur la gauche, droit au sud.

C’est le pas de Soucy, la troisième merveille du cañon, les deux autres étant le Détroit et les Baumes.

Sur les pentes des deux causses, les falaises et les talus font place à des hérissements de roches colossales, aux ruines d’un effondrement général prolongé jusqu’à la rivière ; le courant écume et tourbillonne de plus en plus ; de gros blocs le parsèment ; on perçoit comme le bruit d’une cascade ; la navigation devient impossible ; à peu de distance, le chaos fait barrage : là est la perte du Tarn.


Cirque des Baumes, vue d’ensemble. — Phot. Chabanon.

Un excellent petit chemin de chars, ouvert depuis 1880, circule au milieu de ce bouleversement, aussi saisissant d’aspect que celui de Gavarnie, dans les Pyrénées, et rendu plus étrange encore par les trois roches de l’Aiguille, de la Sourde et de la Roche Rouge. Celle-ci est une belle muraille crénelée de la rive gauche. Sur l’autre bord, à mi-côte et à 150 mètres de hauteur environ, le grand monolithe de l’Aiguille, élevé de 80 mètres et légèrement penché en avant, semble surveiller le Tarn, écrasé par l’écroulement. Le flot s’engouffre sous les blocs avec un bruit effroyable dans les grandes crues, puis remonte en gros bouillons à 400 mètres environ de distance et reprend son cours aérien au milieu de brisants qui peu à peu disparaissent.

« On monte ému à travers ces effroyables entassements, cherchant, silencieux, à atteindre vite le sommet pour juger de l’ensemble. Arrivé là, on jouit