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histoire des églises et chapelles de lyon

l’abbé Castillon, officiai de Digne, et le dernier Michel-François-Marlin Dorsin, vicaire général de Tours.

Sous le chanoine-comte d’Estaing, et avec son agrément, un changement important s’introduisit dans la communauté ; les survivants, Charles Guérin, curé, Nicolas Nivon, infirmier, Pierre Anisson, Antoine Nivon, Guichard Dufresne et Saint-Antoine se sécularisèrent et cédèrent la place à la congrégation des chanoines réguliers de France, plus communément appelés les Génovéfains. Après d’assez longs pourparlers, rendus plus épineux par l’opposition violente de M. de Saint-Antoine qui refusait de quitter les lieux, le nouveau curé et prieur claustral, M. Poussemothe de Montbriseuil, prit possession de l’église, le i mai 1704 ; un noviciat fut aussitôt inauguré, et plusieurs familles y dirigèrent leurs enfants. Ce serait cependant manquer d’impartialité que de taire que les nouveaux venus ne rencontrèrent point partout un accueil empreint d’une extrême bienveillance. On les soupçonnait, avec raison, d’être secrètement favorables aux principes jansénistes, et eux-mêmes le dissimulèrent si peu que, selon les sentiments régnants, ils furent sévèrement traités par le cardinal de Tencin, et des plus favorisés, au contraire, sous son successeur, Monseigneur de Montazet.

Ils jetèrent, bientôt après leur arrivée, les fondations d’une demeure moins incommode que le logis canonial aux exercices de la vie commune ; mais sans les libéralités complaisantes du duc d’Orléans, le fils du régent, ils n’en auraient jamais vu la fin. Elle est maintenant occupée par le refuge des repenties Saint-Michel et, de la montée de Choulans ou du quai de la Saône, dont on l’aperçoit, sa façade percée de ses hautes fenêtres se présente avec un imposant aspect, digne de Soufflot qui la dessina et de Loyer qui en dirigea la construction. Il n’est guère possible de chiffrer exactement les revenus de la maison et de ses prébendes, mais la comptabilité accuse des dettes considérables, des emprunts fréquents et par conséquent des embarras financiers qui se prolongèrent jusqu’à la dissolution de l’ordre. Pour la sacristie, les recettes casuelles ne se seraient pas élevées annuellement au-dessus de 940 livres, en y comptant les offrandes particulières, estimées 220 livres ; le produit des chaises, ne dépassant pas 200 livres, était abandonné au bâtonnier pour ses gages. Cette pénurie de ressources obligea de suspendre des distributions charitables, annoncées à jour fixe et accordées à tout venant ; ainsi, chaque samedi de carême on donnait en aumônes 250 livres de pain, une autre fois une et deux années de vin ; à d’autres dates, le samedi de la Quinquagésime par exemple, on avait à livrer 6 bichets de seigle, 32 bichets de fèves, 182 livres de pain, 91 livres de viande et 3 asnées de vin. Cet usage remontait assez loin et les fonds, qui y étaient affectés, avaient diminué de valeur ou s’étaient perdus. Les Génovéfains demandèrent d’attribuer ces rentes aux indigents du quartier qui seraient mieux secourus et avec plus de discernement. On cria beaucoup, mais la suppression des dons de la porte fut maintenue.

Nos religieux ne s’offusquèrent pas trop de la Révolution, de ses théories, de ses réformes, ni même de ses prescriptions. Un d’entre eux fut nommé curé constitutionnel de la paroisse, un autre, son frère jumeau, vicaire épiscopal de l’intrus. L’église souterraine, durant le siège, servit d’abri aux habitants contre les boulets des batteries de la Convention ; le prieuré fut transformé en hôpital militaire.