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histoire des églises et chapelles de Lyon

trouva, de son temps, un édicule dont la destination demeurée incertaine était pour lui un ustrinum ou four, dans lequel on aurait brûlé les corps des martyrs. C’est, en effet, à Ainay que l’historien Grégoire de Tours place le martyre de saint Polhin et de ses compagnons, dans un amphithéâtre dont il ne reste plus de trace parce qu’il aurait été édifié en bois.

Cette opinion soutenue surtout par de Boissieu, est abandonnée depuis la découverte, d’un amphithéâtre faite par M. Lafont dans sa propriété de Fourvière. D’autre part, Grégoire de Tours, neveu de saint Nizier, et venu plusieurs fois à Lyon, parle du culte qui aurait été rendu aux saints martyrs. Pour concilier ces opinions avec les découvertes modernes, il est bon de rappeler que la loi romaine interdisait formellement d’ensevelir et de brûler les corps dans l’intérieur de la ville : les martyrs auraient donc souffert à Fourvière et leurs corps, transportés à Ainay, y auraient été brûlés, enfin leurs cendres jetées dans le fleuve suivant les termes de la lettre adressée par les chrétiens de Lyon à leurs frères d’Asie : « Après avoir laissé, dit ce document, les corps durant six jours, exposés sur la terre à toutes sortes d’ignominie, les païens s’avisèrent de les brûler et ils en jetèrent les cendres dans le Rhône, s’imaginant par là pouvoir ôter à Dieu la puissance de ressusciter les saints martyrs et aux martyrs l’espérance de ressusciter un jour dans leur corps. » La légende, mais non l’histoire, ajoute que les chrétiens auraient recueilli sur les bords du fleuve une partie des cendres des martyrs et les auraient transportées à Saint-Nizier, enfin que, plus tard, Ainay aurait hérité d’une partie de ces reliques.

Abbés réguliers. — Au ve siècle, apparaît à Ainay un solitaire appelé Badulphe, qui se serait établi près de l’endroit où auraient été brûlés les corps et aurait ainsi commencé le culte aux saints martyrs. L’histoire de Badulphe est fortement mise en doute, et de fait, aucun document historique n’en parle avant le xive siècle : La Gallia christiana, très réservée à ce sujet, s’exprime ainsi : « On croit que saint Badulphe fut le premier abbé d’Ainay, mais on ne sait à quelle époque il a vécu ; on célèbre sa fête le 19 août. » Son successeur aurait été Sabinus ; il est mentionné comme vivant au ve siècle dans la vie de saint Romain, abbé de Joux (Ain), et y est appelé abbé Lugdunensis Interamnus, c’est-à-dire abbé d’une île qui se trouve à Lyon ; sa communauté est représentée comme florissante ; quoique le nom d’Ainay ne se trouve point dans le texte, il n’est pas douteux qu’il ne s’agisse d’Ainay, car il n’y avait aucune autre île à Lyon. À Sabinus succède Anselme vers 546 ; il est mentionné dans une chronique publiée par La Mure comme ayant fondé l’abbaye Saint-Pierre de Lémenc au diocèse de Genève. Après Anselme se trouve une lacune de trois cents ans, qu’on ne peut combler, et on arrive ainsi à l’année 859 où Aurélien restaura à Ainay et l’édifice et la vie monastique. Ce personnage, avec la permission de Gaucemar, abbé de Bonnevaux au diocèse de Chartres, amena douze religieux pour repeupler l’abbaye d’Ainay ; plus tard, il fonda le monastère de Cessieu en Dombes, devint abbé de Condat, aujourd’hui Saint-Claude, puis de Nantua, enfin archevêque de Lyon. Mentionnons encore au ixe siècle Utubaldus, abbé d’Ainay, dont on ne sait que le nom.