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histoire des églises et chapelles de lyon

lier continua la tradition des religieux et le premier des vicaires de M. Pascal, M. de Buffevent, s’empressa de rendre au sanctuaire antonin sa décence, sa clientèle et sa popularité. M. Merley établit, en 1870, l’exercice des treize mardis. On est redevable à M. Méchin de la reconstitution de l’Archiconfrérie et de son approbation par Mgr l’archevêque, le 23 mars 1894. Son attention ne négligea pas davantage les améliorations matérielles ; sur son initiative, que plusieurs estimeront courageuse, les ex-voto, peu décents, ridicules et encombrants, furent élagués ; il enrichit l’autel, dès 1879, d’une garniture de chandeliers, de lampes et de lustres ; en 1895, d’une bannière et d’une statue en bronze, qui lui coûta 2.000 francs. Il installa, dans le fond, ce qu’il appela lui-même un meuble-ostensoir, vaste placard, avec de larges baies vitrées, où il déposa les châsses et les reliquaires et les offrit ainsi perpétuellement aux regards et à la vénération des fidèles ; deux statuettes d’anges, l’un sonnant de la trompette, l’autre armé d’une épée, se dressent, de chaque côté de la corniche, ils annoncent, celui-là, le réveil futur : exultabunt, celui-ci, le dépôt sacré dont il a la garde : custodit Dominus ossa corum. La fresque et les peintures décoratives sont du pinceau de Balouzet. À cette époque, dans l’année quii précédait le septième centenaire de la naissance du saint à Lisbonne, il se produisit, tout à coup et d’une façon assez inexplicable, un renouveau populaire de son culte et de confiance en sa miraculeuse intercession. Il devint l’avocat de toutes les victimes des coups de la fortune, grands ou petits, et, en même temps, cette innombrable clientèle l’établit le père nourricier des pauvres, en payant d’avance, par une aumône charitable, la grâce qu’elle sollicitait. Le mouvement partit de Toulon, de l’arrière-boutique d’une mercière modeste, dont la foi se montra capable de transporter des montagnes. Bientôt la France entière fut aux genoux du thaumaturge ; on lut érigea des milliers de statues et les quantités immenses de pain blanc, distribuées partout, en son nom, ne furent pas le prodige le moins étonnant de son influence ressuscitée. Il n’y eut, à Saint-Bonaventure, qu’à persévérer dans la tradition, en l’amplifiant au gré des convenances et des besoins. M. le Curé institua la messe des pauvres, chaque lundi ; comme dans la parabole de l’Évangile, il donnait rendez-vous à tout venant, pourvu qu’il soit indigent, quelle que soit du reste sa provenance, son état-civil, son âge ou son sexe. Chacun recevait une piécette de 0.50 centimes et deux kilogs de pain, avec quelle joie et quelle avidité, on le devine, mais il emportait aussi le souvenir de quelques bonnes paroles, réconfortantes et paternelles. Cela dura quatre ou cinq ans et on n’y a pas renoncé, sans tristesse, devant l’impossibilité matérielle de continuer. On compta, dans ces assemblées hebdomadaires, jusqu’à 800 pauvres et, d’après une comptabilité rigoureusement tenue, on dépensa 123.147 francs (cent vingt-trois mille cent quarante-sept francs). C’était dans le lieu même, où l’Aumône Générale avait pris naissance, et où elle avait nourri la foule des gueux de 1331 à 1790, la reproduction de ses largesses et de son universelle pitié.

Le Triduum du centenaire, célébré au milieu de conditions aussi favorables, souleva un enthousiasme exceptionnel ; les trois journées des 16, 17 et 18 juin 1895 renouvelèrent ce qu’on avait admiré, vingt ans auparavant, pour la solennité séculaire de Saint-Bonaventure. Le cardinal Coullié présida un des saluts ; les dignitaires du chapitre et les