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Tout ruisselant de sang et son épée nue à la main, Dankwart s’écrie alors d’une voix qui fait trembler la salle : « Pourquoi rester si longtemps assis, frère Hagen ? J’élève vers vous et vers le Dieu du ciel la plainte de notre malheur ; nos chevaliers et nos serviteurs sont étendus sans vie sur la pierre. — Tiens-toi à la porte, Dankwart, afin que nul ne s’échappe ! » Telle est la réponse de Hagen ; et déjà sa formidable épée brille dans sa main impatiente. D’un premier coup, il fait voler sur les genoux de Chriemhilt la tête de son fils innocent ; un second coup, et le gouverneur de l’enfant roule aux pieds de Hagen ; il frappe une troisième fois, et la main du musicien Werbel, le même qui avait été chargé du message en Bourgogne, est coupée sur sa viole. À l’exemple de Hagen, Folker se lève, puis Gunther, puis Gernot, puis enfin Giselher, et tous, altérés de vengeance, se précipitent sur les Huns rassemblés dans la salle. Ils tombent l’un après l’autre, et la salle est remplie de cadavres. Folker court se placer aux côtés de Dankwart, afin de soutenir avec lui le choc des guerriers amassés au dehors et qui veulent se frayer un passage : « Le bras de deux héros, s’écrie Folker, en s’adressant à Hagen, protégera mieux cette porte que ne le feraient mille verrous de fer. »

Au milieu de cet affreux carnage, Chriemhilt, que la mort menace, appelle Dietrich à son secours ; et le roi des Goths, qui naguère avait refusé à la reine de servir ses projets de vengeance, n’hésite pas maintenant à montrer le dévouement et la protection qu’il doit à la femme, à la reine, à l’épouse de son ami. Il pousse un cri si formidable, que le burg entier résonne, et