Aller au contenu

Page:Martin - Poètes contemporains en Allemagne.djvu/190

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 182 —

J’ai pleuré pendant mon sommeil : je rêvais que tu gisais dans la tombe. Je me réveillai, et pourtant les larmes coulèrent encore le long de mes joues.

J’ai pleuré pendant mon sommeil : je rêvais que tu m’abandonnais. Je me réveillai, et pourtant je versai longtemps encore des larmes amères.

J’ai pleuré pendant mon sommeil : je rêvais que tu continuais d’être bonne pour moi. Je me réveillai, et pourtant le torrent de mes larmes s’élance plus abondant toujours.


Pourquoi les roses sont-elles donc si pâles ? pourquoi ? Réponds, ô ma bien-aimée ! pourquoi parmi le vert gazon les violettes azurées sont-elles si muettes ?

Pourquoi si plaintive aujourd’hui la chanson de l’alouette perdue dans le ciel ? Pourquoi le calice des fleurs embaumées n’exhale-t-il qu’une vapeur funèbre ?

Pourquoi le soleil descend-il vers la prairie d’un air si froid et si triste ? Pourquoi donc la terre paraît-elle si grise, et muette comme un tombeau ?

Et moi-même, pourquoi suis-je si languissant et si sombre ? chère bien-aimée, pourquoi ? — Ô toi ! la meilleure partie de mon cœur, réponds : pourquoi m’avoir abandonné ?


La nuit était étendue sur mes yeux, le plomb était étendu sur ma bouche ; le front morne et le cœur glacé, j’étais étendu dans la tombe.

Combien de temps dura ce funèbre sommeil, je ne le saurais dire ; il me sembla que j’étais réveillé brusquement par quelqu’un qui frappait à mon cercueil :

— Ne veux-tu pas te lever, Henri ? Le jour éternel commence ; les morts ont quitté leurs linceuls ; voici l’aube de la félicité qui ne doit pas finir.