Page:Martin - Poètes contemporains en Allemagne.djvu/217

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 209 —

mande, à cette frontière de la légèreté et de la sensualité françaises. » — Il va sans dire que je n’applaudis tout à fait qu’à la première moitié de cette phrase.

Nous avons maintenant à parler de deux poètes qui représentent plus particulièrement l’esprit français dans leurs compositions allemandes : MM. Auguste Lamey et Louis Spach. Dans un récent article de la Revue des Deux Mondes, M. Saint-René Taillandier a dit de M. Lamey qu’il était le dernier poète allemand en Alsace. Il l’aurait plus exactement désigné comme le doyen des nombreux poètes allemands de l’Alsace aujourd’hui vivants, et qui ne seront pas les derniers. M. Lamey, qui naquit à Kehl en 1772, est un demi-contemporain de Goethe, et son œuvre poétique en témoigne : les fraîches brises qui ont soufflé depuis sur la lyre germanique semblent ne l’avoir que légèrement effleuré, sa forme littéraire, d’ailleurs très-correcte, et en général fort louable, révélant plutôt la sage et méthodique composition du cabinet que la libre inspiration de la fantaisie. Élevé au milieu de la fermentation d’idées qui marqua la fin du dix-huitième siècle, témoin des gigantesques scènes qui étonnèrent alors le monde et qui éclairèrent de si vives flammes les débuts du siècle nouveau, il devait garder de ces souvenirs et de ces spectacles une empreinte ineffaçable. Tel il nous apparaît dans ses poésies, où le philosophe ami du progrès et le citoyen dominent souvent le poète, mais en le faisant aimer. Le milieu dans lequel il s’était développé ne pouvait guère en faire un rêveur. Son idéal devait être l’action, et surtout la gloire qui rejaillit de l’éclat des armes. M. Lamey a célébré en vers allemands tous les triomphes des ar-