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Page:Martin - Poètes contemporains en Allemagne.djvu/26

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tions du passé. Vous connaissez ces jolis recueils, que l’on rencontre, avec la Bible, dans les plus humbles chaumières d’outre-Rhin. L’air est noté en regard de chaque chant, et de gracieux dessins sur bois, pleins de détails tour à tour gais, tristes, moqueurs, fantastiques ou touchants, figurent le petit drame que les strophes déroulent. C’est comme une épopée imagée et familière où l’homme, roi débonnaire de la création, apparaît toujours entouré de fleurs, de fruits et d’oiseaux qui, la plupart du temps, viennent sans crainte se poser sur son épaule. Les physionomies, les attitudes des divers personnages, la disposition des objets en apparence les plus indifférents, tout concourt à l’effet et donne à ces pages une expression qui porte à la rêverie. L’amour, le vin et les chants y occupent naturellement une première place : « Quiconque est insensible à la femme, au chant et au vin, celui-là ne sera qu’un sot sa vie durant. » C’était déjà la maxime de Luther ; c’est devenu le refrain d’un lied que tout bon Allemand répète d’un air inspiré. Ces poètes ont chanté le vin avec une sorte de frémissement religieux que nos Collé, nos Panard et nos Désaugiers n’ont pas connu. Le vin leur inspire des odes, à nous des flonflons. Rappelez-vous le patriotique dithyrambe de Mathias Claudius en l’honneur du sang des vignes rhénanes :

Couronnez de verdure le cher gobelet plein, et videz-le joyeusement ! Dans l’Europe entière, messieurs les buveurs, trouvez donc un vin qui vaille celui-là !

Dans son heureuse fécondité, c’est le sol paternel qui le porte : ne vous étonnez donc pas de le trouver si bon, de le trouver si généreux, si calme, et si rempli de force et d’ardeur !