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Page:Martin - Poètes contemporains en Allemagne.djvu/55

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dernière pensée à ceux qu’il aime, alors ce jeune soldat ne craindra plus d’envisager la mort en face ; il deviendra tout simplement un héros, un martyr. Quoi de plus navrant que ces trois strophes oh je croîs voir l’expression suprême de l’abnégation militaire ?

Le bon camarade

J’avais un camarade ; un meilleur tu ne le trouveras jamais. Le tambour battit la chaîne. Il marchait à mon côté, du même élan, du même pas.

Une balle prit son vol vers nous. Est-elle pour moi ? est-elle pour toi ? — C’est lui qu’elle a renversé : il est étendu à mes pieds, comme un débris de moi-même.

Il veut encore me tendre la main ; mais je dois recharger mon fusil. — Je ne puis pas te donner la main : au revoir, dans la vie éternelle, au revoir, mon bon camarade.


Il n’était pas dans les rangs, en présence de l’ennemi, ce malheureux soldat suisse qui ne put s’empêcher de déserter, lorsque la trompe des Alpes fit retentir jusqu’à son oreille, fit palpiter jusque dans son cœur les simples notes du ranz des vaches ; il n’était pas dans les rangs, mais dans la forteresse de Strasbourg, et l’irrésistible souvenir de la patrie, qui lui arrivait avec l’écho de ses montagnes, le fascina, l’entraîna, — et le voilà dans le Rhin, nageant vers l’autre rive. Mais il faut laisser parler ici la complainte populaire :

Le Suisse

À Strasbourg, dans le fort, c’est là que commença mon malheur ; de là j’entendis la trompe des Alpes résonner par