Page:Martin du Gard - Le Cahier gris.djvu/50

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— « Des voyous comme ce Fontanin », gronda t-il, en se levant, « est-ce que ça ne devrait pas être enfermé dans des maisons spéciales ? Est-ce qu’il est admissible que nos enfants soient exposés à de semblables contagions ? » Les mains au dos, les paupières closes, il allait et venait derrière son bureau. La pensée du Congrès manqué, quoiqu’il n’en parlât pas, entretenait sa rancune. « Voilà plus de vingt ans que je me dévoue à ces problèmes de la criminalité enfantine ! Vingt ans que je lutte par des ligues de préservation, des brochures, des rapports à tous les congrès ! Mieux que ça ! » reprit-il en faisant volte-face dans la direction des abbés : « Est-ce que je n’ai pas créé, à ma colonie pénitentiaire de Crouy, un pavillon spécial, où les enfants vicieux, lorsqu’ils appartiennent à une autre classe sociale que nos pupilles, sont soumis à un traitement particulier de correction ? Eh bien, ce que je vais dire n’est pas croyable : ce pavillon est toujours vide ! Est-ce à moi d’obliger les parents à y enfermer leurs fils ? J’ai tout fait pour intéresser l’Instruction Publique à notre initiative ! Mais », acheva-t-il en haussant les épaules et en retombant