Page:Martin du Gard - Le Cahier gris.djvu/97

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et n’es-tu pas devenu plus encore ? la vraie moitié de moi-même ? N’ai-je pas contribué à former ton âme comme tu as contribué à former la mienne ? Dieu, que je sens tout cela vrai et fort, en t’écrivant ! Je vis ! Et tout vit en moi, corps, esprit, cœur, imagination, grâce à ton attachement, dont je ne douterai jamais, ô mon vrai et seul ami !

« D. »

« P. -S. J’ai décidé ma mère à bazarder mon vélo, qui est vraiment trop clou.

« Tibi,

« D. »


Une autre lettre de Jacques :


« Ô dilectissime !

« Comment peux-tu être tantôt gai et tantôt triste ? Moi, dans mes plus folles gaîtés, je suis parfois la proie d’un amer souvenir. Non, jamais plus, je le sens, je ne saurai être gai et frivole ! Devant moi se dressera toujours le spectre d’un inaccessible Idéal !

« Ah, parfois je comprends l’extase de ces nonnes pâles au visage exsangue, qui passent