Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/189

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aurait sans doute, assis à cette même place, un nouveau membre de l’Institut. Il vint au-devant de ses fils et embrassa le cadet. Jacques sanglotait. M. Thibault vit dans ces larmes une preuve de ses remords, de ses bonnes résolutions ; il en fut ému plus qu’il ne voulût le laisser paraître. Il fit asseoir l’enfant sur un des fauteuils à hauts dossiers qui encadraient la cheminée, et, debout, les mains au dos, allant, venant et soufflant à son habitude, il prononça une brève admonestation, affectueuse et ferme à la fois, rappelant sous quelles conditions Jacques avait le bonheur de réintégrer le foyer paternel, et lui recommandant de témoigner à Antoine autant de déférence et de soumission que s’il se fût agi de lui-même.

Un visiteur inespéré écourta la péroraison ; c’était un futur collègue, et M. Thibault, soucieux de ne pas le laisser se morfondre dans le salon, congédia ses fils. Il les reconduisit néanmoins jusqu’à la porte de son cabinet, et tandis qu’il soulevait d’une main la portière, il posa l’autre sur la tête du pupille repenti. Jacques sentit les doigts paternels caresser ses cheveux et tapote sa nuque avec une familiarité si nouvelle