Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/279

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— « Je veux dire : un homme comme tous les autres… Je veux… aimer, oui, plus tard, mais alors ce sera quelqu’un de… enfin quelqu’un de pur, qui sera venu à moi autrement… pour autre chose… Je ne sais pas comment vous expliquer. Enfin un homme très différent de vous.

— « Merci ! »

Son désir était tombé ; il ne songeait plus qu’à éviter de paraître ridicule.

— « Allons », reprit-elle, « la paix ; et n’y pensons plus. » Elle entr’ouvrit la porte ; cette fois, il la laissa faire. « Amis ? » fit-elle, en lui tendant la main. Il ne répondit pas. Il regardait ses dents, ses yeux, sa peau, ce visage étalé qu’elle offrait comme un fruit. Il eut un sourire forcé et ses paupières battirent. Elle prit sa main et la serra.

— « Ne gâchez pas ma vie », murmura-t-elle avec une inflexion câline. Et, drôlement, les sourcils levés : « Un rouleau de clichés, ça suffit pour aujourd’hui. »

Il consentit à rire. Elle ne lui en demandait pas tant, et en ressentit un peu de tristesse. Mais, en somme, elle était assez fière de sa victoire, et de l’opinion qu’il aurait d’elle, plus tard.