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de Muzafferjing ; durant sa direction du Bengale, il se laissa guider par d’autres sentiments. Il avait pleine confiance en ses voisins de Calcutta et entretenait avec eux les meilleures relations ; il ne songeait pas et n’avait pas à songer que les amitiés les plus fidèles ne subsistent que par un soutien mutuel de leurs droits et que le jour où l’une des parties ne poursuit que ses propres intérêts, tout est remis en question, souvent à ses dépens.

Était-il affectueux, son cœur était-il froid, son âme était-elle dure ? Autant de questions auxquelles une réponse précise est difficile. Tenu par ses fonctions à une très grande réserve, il jouait en public le rôle d’un homme qui ne doit jamais se livrer tout entier et la tenue de sa vie fut toujours d’une très grande correction. Personne n’a jamais écrit qu’il l’ait gaspillée en de faciles amours ; lorsqu’il se maria en 1741, à l’âge de 44 ans, avec Madame Vincens, il ne lui apportait pas un cœur désabusé, et ses affections pouvaient encore avoir les caresses exquises d’un automne naissant.


Il existe à Pondichéry, sur une place publique, face à la mer, une très belle statue de Dupleix, œuvre du sculpteur Th. Gruyère, inaugurée le 16 juillet 1870. L’homme y est représenté debout sur un socle constitué par plusieurs colonnes de granit, dans une attitude fière et noble, sans exagération. La pose est naturelle et gracieuse. En contemplant ce visage coulé dans le bronze, on est frappé, si la ressemblance est exacte, de l’expression de volonté contenue dans les traits. La mâchoire inférieure, très nettement accusée, est le signe de la force un peu brutale. Les yeux regardent droit l’horizon, comme s’ils cherchaient moins à le pénétrer qu’à le dominer. La figure entière est carrée et d’une puissante ossature. Assu-