« Je sais que tous les établissements français dans l’Inde sont de la dépendance de M. le Gouverneur Général et du Conseil Supérieur. Je sais aussi que le roi et le ministre en me donnant le commandement de toute la marine m’ont laissé le maître de mes opérations. Madras n’est certainement pas une colonie française, mais une conquête que je viens de faire, ainsi personne n’a droit d’y commander que moi. Je sais tout le cas que je dois faire de vos avis ; voilà pourquoi j’ai eu l’honneur de vous les demander. J’aurais pensé que pour le bien du service vous n’auriez pas dû me les refuser, mais puisque vous ne pouvez conseiller sans ordonner, il est tout naturel que j’aille chercher ailleurs des avis qui me conservent l’indépendance dont le roi et la Compagnie m’honorent depuis douze ans.
« Comme la saison presse, je vais consommer le mieux que je pourrai l’affaire de Madras. Si je manque dans le fonds ou dans la forme, ce ne sera pas manque de vous avoir demandé conseil ; j’espère que Sa Majesté et le Ministre m’excuseront[1]. »
Si jaloux de ses attributions que fût Dupleix, il est vraisemblable qu’il fut moins sensible au chagrin de voir contester ses pouvoirs qu’à celui de perdre Madras par le traité de rançon.
La conclusion de ce traité, prévue au moment de la capitulation, n’avait cessé depuis lors d’être l’objet de conférences entre la Bourdonnais et le Conseil anglais ; ni l’un ni l’autre ne paraissaient pressés de terminer l’affaire. Si l’on en croit la Bourdonnais, les Anglais tenaient sans cesse des conseils où rien ne se décidait, mais si l’on s’en rapporte à d’Espréménil, la Bourdonnais était plus hésitant encore. Il passait son temps à changer de sentiments : tantôt il voulait rançonner la ville et tantôt la démante-
- ↑ A. C. C2 81, p. 189. Lettre du 26 septembre.