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Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 3.djvu/67

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et que cela l’encourageait. (D. à Véry, 14 octobre 1753). Mais il s’en fallait que ses désirs fussent toujours réalisés ; le soldat prenait en général peu de soin de ses vêtements et ils étaient vite hors d’usage : il y avait des hommes qui usaient jusqu’à trois costumes en moins de six mois. Ce gaspillage désespérait Dupleix qui ne cessait de recommander aux majors de faire de fréquentes revues. « Le peu d’attention que l’on a de faire souvent l’inspection du soldat est l’unique cause de l’état pitoyable où il est pour l’habillement. On a beau en envoyer, il est toujours en guenilles. » (D. à Véry, 20 sept. 1753).

Il est inutile d’ajouter que le vin et les femmes étaient la cause des rixes et des disputes habituelles dans une armée. On ne venait pas aux Indes pour vivre en anachorètes. Nul doute que ces désordres eussent été plus fréquents encore si le vin, qui venait de France, avait été d’un débit courant et si la femme indoue avait été plus libre de ses mouvements ; mais on sait avec quelle réserve distante les Indiens entretenaient des rapports avec les Européens ; notre contact est pour eux une sorte de souillure qu’on ne lave que par une purification rituelle. C’était jusqu’à un certain point une assurance contre le relâchement exagéré des mœurs.

Tels étaient nos soldats de l’Inde. Le tableau que nous avons tracé paraîtra peu enchanteur, mais n’est-ce pas Dupleix lui-même qui nous a dépeint tous leurs défauts, et n’est-ce pas encore lui qui a qualifié le soldat, dans une lettre à Law du 11 décembre 1751, « d’espèce d’animal peu raisonnable » ? Sans être aussi absolu, on reconnaîtra cependant que livrés à eux-mêmes les hommes donnent toujours le spectacle de l’anarchie et de la faiblesse ; il leur faut une autorité qui commande et qui les dirige. Le courage lui-même ne s’improvise pas ; s’il n’y a pas de