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LE MUSICIEN DE PROVINCE

des classes d’Elwarth. Pour lui, la musique italienne était la meilleure des musiques parce qu’elle était la plus chantante. Mozart et Beethoven étaient des maîtres, mais réservés aux initiés. Sébastien Bach était utile. Il fallait l’étudier plutôt que le goûter.

En France, il y avait Boïeldieu et Gounod. La Dame blanche et Faust étaient l’expression parfaite du génie français, des chefs-d’œuvre auxquels on pouvait comparer Les Huguenots, ce colosse !

Rossini avait les préférences de M. Grillé. Celui-ci étant chef d’orchestre à Lyon, Rossini en voyage s’était arrêté quelques heures dans cette ville. Les musiciens de l’orchestre avaient décidé de lui faire une aubade. M. Grillé avait conduit sous les fenêtres de l’hôtel où était descendu le maître, l’ouverture de Guillaume Tell et celle du Barbier de Séville. Rossini avait serré les mains du chef d’orchestre en le remerciant et en le félicitant. Ce fut, bien entendu, un instant inoubliable de la jeunesse de M. Grillé. Après avoir raconté l’anecdote, il ajoutait toujours avec une petite moue : « C’était un grand génie, mais il a mis du Barbier partout ! »

Il va sans dire que M. Grillé n’aimait pas Wagner que du reste il ignorait complètement.

Un jour que je le questionnais à ce sujet, il me dit qu’il avait déchiffré au piano l’ouverture de Tannhaüser et qu’il la trouvait belle. Je crois