Page:Martinov - De la langue russe dans le culte catholique, 1874.djvu/32

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tincts de la langue russe ; mais l’accord cesse, lorsqu’il s’agit de déterminer leur ancienneté. Existaient-ils dès le IXe siècle, ou sont-ils d’une formation postérieure à l’époque de l’invasion des Tatars (XIIIe-XVe siècle) ? Là-dessus, les opinions se partagent. Les uns soutiennent que primitivement il n’y avait qu’une seule langue commune à tous les peuples slaves dont fait mention la chronique attribuée à Nestor ; que les trois dialectes se sont formés après l’invasion des Tatars, par suite des situations diverses où avaient été placés les peuples qui les parlent. D’autres prétendent, au contraire, que cette diversité est contemporaine de la formation du peuple russe et que, par conséquent, les trois dialectes existaient dès le commencement, quoique sous des formes moins déterminées.

On se demande, de plus, quelle est cette langue autrefois commune aux Slaves du midi ? Les partisans de l’Ucraine assurent que c’est le petit-russien, langue de Nestor, du chant d’Igor, etc., le russe par excellence. Les défenseurs de la nationalité grand-russe assurent de leur côté que c’est l’idiome grand-russien, que les premiers habitants de la Kievie (les Polanes des chroniqueurs) étaient les Grands-Russiens, lesquels, refoulés au nord par les Tatars, furent remplacés par les Petits-Russiens venus des monts carpathes.

Comment concilier ces deux opinions et à laquelle des deux langues rivales donner la priorité ? L’état actuel de la linguistique est trop peu avancé et les monuments littéraires de la première période sont trop peu nombreux pour pouvoir fournir une réponse satisfaisante. Toutefois, le témoignage de la chronique la plus ancienne, qui parle de divers peuples ayant chacun leur religion et leurs usages particuliers, permet de supposer aussi la diversité des idiomes locaux. En outre, la différence qui existe entre la langue du Nord et celle du Midi est telle qu’elle fait du petit-russien un idiome aussi distinct du grand-russien que le sont d’autres dialectes slaves, et, en tout cas, elle suppose que cette branche s’est séparée de la souche commune à une époque très éloignée. De la diversité des langues on concluait à celle de la nationalité ; c’était une conséquence naturelle, et c’est à ce titre que les Ucrainiens revendiquaient une littérature à part. Mais il y avait encore une autre raison, c’est que la langue do-