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DE LA LANGUE DE CORNEILLE

sur Malherbe, que Corneille a osé le premier faire meurtrier de trois syllabes,

Jamais un meurtrier en fit-il son refuge ?
Jamais un meurtrier s’offrit-il à son juge ?

(Le Cid.)
et il ajoute : « Je suis un des premiers qui ay imité en cela M. Corneille, aïant remarqué que les Dames et les Cavaliers s’arrestoient, comme à un mauvais pas, à ces mots de meurtrier, sanglier, bouclier, peuplier, lorsqu’ils étoient de deux syllabes, et qu’ils avoient peine à les prononcer. M. de Segrais, qui a l’oreille fort délicate, et qui n’est pas moins bon Juge de la Poësie que bon Poëte, se joignit aussi-tost à nostre parti. »

Le désir naïf d’une assimilation impossible se montre bien clairement ici, et Ménage tenait si fort à cette remarque que, tout en reconnaissant, dans la deuxième édition de ses Observations sur la langue française, que Corneille n’a fait en cela que revenir à un usage ancien dont on trouve des exemples dans Jodelle et dans Régnier, il laisse subsister néanmoins son texte primitif sans aucune modification.

Parmi les citations de Corneille, accumulées par Ménage dans le livre dont nous venons de parler, il en est deux qui méritent une attention toute particulière. À l’occasion de la locution où que, Ménage rapporte ce vers de notre poète, dans sa Thébaïde, page 68 :

Où qu’il jette la vue, il voit briller des armes.
et plus loin, parmi les auteurs qui ont employé sphinx au masculin, il mentionne « M. Corneille dans sa Thébaïde, livre II, p. 65 ».

Dont autrefois le Sphinx, ce monstrueux oiseau,
Avoit pour son repaire envahi le coupeau.