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ESSAI SUR LA LANGUE DE LA FONTAINE

… un jeune homme, après avoir en France
Étudié, s’en revint à Florence,
Aussi leurré qu’aucun de par delà[1].

Leurré veut dire, ici, bien dressé, bien instruit, rusé, par allusion au faucon dont l’éducation est faite lorsqu’il est accoutumé au leurre.

Il faut se garder de croire que le mot entregent, qui n’est appuyé dans le Dictionnaire néologique de Mercier que par un exemple tiré du VIIIe livre des Confessions de J.-J. Rousseau, ait été créé par cet écrivain.

Non seulement La Fontaine l’a employé[2], mais on le trouve dans les Tragiques de d’Aubigné[3]. C’est, suivant toute apparence, une expression métaphorique empruntée à la fauconnerie ; en effet, nous lisons dans un passage du Ménagier de Paris, où il est question du jeune oiseau qu’on dresse : « Il vous convient continuer à le tenir souvent sur le poing et entre gent tant et si longuement que vous pourrez[4], » et un peu plus loin : « En cest endroit d’espreveterie, le convient plus que devant tenir sur le poing et le porter aux plais et entre les gens aux églises et ès autres assemblées[5]. »

IV

Nous avons vu que les termes de chasse sont souvent employés au figuré dans le langage de la galanterie ; les expressions empruntées à l’art militaire n’y sont pas moins fréquentes. Notre poète nous en prévient lui-même dans ces jolis vers :

  1. Liv. III, c. I, 22.
  2. Liv. II, c. XV, 30.
  3. Liv. II, p. 73.
  4. Tome II, p. 290.
  5. P. 296.