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LA LANGUE DE LA PLÉÏADE

traction élégante, comme la musique et la danse, tenait parmi les plaisirs de la Cour un rang un peu inférieur à la chasse, à l’escrime, à l’équitation et au jeu.

Il en était encore de même au commencement du règne d’Henri II ; et lorsqu’en 1548 Thomas Sibilet publie son Art poëtique François, Pour l’instruction des ieunes studieus, et encor peu avancez en la Poësie Françoise, son but est surtout d’être utile à ceux qui riment par simple passe-temps. Il leur désigne d’abord des modèles : « Lira le nouice des Muses francoises Marot, Saingelais, Salel, Heroet, Scene, et telz autres bons espris, qui tous les iours se donnent et euertuent a l’exaltation de cete Françoise poësie. »

Quant aux genres que Sibilet conseille à son adepte de cultiver, ce sont les plus habituels, et l’idée d’en proposer de nouveaux ne se présente même pas à son esprit ; voici les titres des treize chapitres où il en fait l’énumération : « De l’Épigramme ; du Sonnet ; du Rondeau ; de la Balade ; du Chant Royal ; du Cantique, Chant lyrique ou Ode, et Chanson ; de l’Épistre, et de l’Élégie ; du Dialogue, et ses espèces, comme sont l’Éclogue, la Moralité, la Farce ; du Coq à l’asne ; du Blason et de la définition et description ; de l’Énigme ; de la Deploration, et Complainte ; du Lay et Virelay. »

La Deffence de la langue françoise est sur tous les points une réfutation de l’ouvrage de Sibilet. Les écrivains dont celui-ci fait l’éloge, et les genres surannés qu’ils cultivent, sont attaqués par Du Bellay avec la plus grande violence (I, 38) : « Ly donques, s’écrie-t-il, et rely premierement (Ô Poëte futur), fueillette de Main nocturne et iournelle, les Exemplaires Grecz et Latins, puis me laisse toutes ces vieilles Poësies Francoyses aux Ieuz Floraux de Toulouze, et au puy de Rouan : comme Rondeaux, Ballades, Vyrelaiz, Chantz Royaulx, Chansons, et autres telles episseries, qui corrumpent le