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LENOIR-DUFRÈNE.




Lenoir-Dufrêne, né à Alençon, le 24 juin 1768, avait établi à Paris, rue de Charonne, une manufacture de tissus de coton, dont la beauté, la finesse, soutenaient, avec le plus grand avantage, la concurrence des produits anglais dans le même genre. Avant d’avoir obtenu ces résultats, d’une si haute importance pour l’industrie française, M. Lenoir s’était livré à des expériences nombreuses : ses premiers essais ne le satisfirent point. Animé du vif désir d’enlever à l’Angleterre une branche d’industrie qui nous rendait ses tributaires, il n’épargna ni les soins, ni la fatigue, ni le temps. Il s’était assujetti à être l’instituteur de ses ouvriers ; travaillant avec eux, les dirigeant lui-même, louant ce qu’ils avaient fait bien, et leur montrant les moyens de faire mieux, tant il était jaloux de ne pas laisser à nos voisins d’outre-mer une supériorité qu’il sentait la possibilité de leur ravir. Le succès, enfin, couronna des travaux entrepris et soutenus avec une infatigable persévérance ; et la France, dans ce genre de fabrication, ne connaît plus de rivale.

M. Lenoir ne considérait pas ses ouvriers comme les instrumens de sa fortune et de sa gloire ; et bien différent de certains chefs d’établissemens industriels, il leur portait un intérêt réel ; il leur vouait un véritable attachement. A le voir au milieu d’eux, dans ses vastes ateliers, on eût cru voir des enfans travaillant sous la direction de leur père ; il leur prodiguait, selon l’occurrence, les conseils, les consolations ou les secours ; et cette réunion de tant d’individus, qu’un seul homme faisait mouvoir à son gré, et que ceux-ci entouraient de respect et de reconnaissance, ne présentait que l’aspect d’une seule famille, aussi unie qu’elle était heureuse.

A la mort de M. Lenoir, près de cinq mille ouvriers accompagnèrent sa dépouille mortelle. Cette marche silencieuse et sombre était le plus bel hommage qu’ils rendaient aux vertus de l’ami, du bienfaiteur qu’ils venaient de perdre ; et si quelques paroles s’échappaient de ces poitrines oppressées, c’était un éloge ou un regret.

Les quatre inscriptions qui décorent chacune des faces du monument élevé à